La journée du 10 septembre a été marquée par une forte tension à Rennes. Dès le matin, la rocade sud et des axes d’accès majeurs comme la gare routière de ViaSilva ont été bloqués, perturbant fortement la circulation. Des affrontements ont éclaté avec les forces de l'ordre et un bus du réseau Star, heureusement vide de passagers, a été incendié.
L'apres-midi, plusieurs milliers de manifestants ont défilé dans le centre-ville dans le cadre d'une mobilisation déclarée et encadrée, qui s'est globalement déroulée dans le calme. Mais en fin de journée, des affrontements ont éclaté avec les forces de l'ordre. Des dégradations ont aussi été constatées place Sainte-Anne et dans plusieurs rues commerçantes.
Ces événements, qui ont une fois de plus placé Rennes au coeur de l'actualité nationale, ont suscité de vives réactions parmi les responsables politiques locaux, partagés entre condamnation des violences, mises en garde et revendication du mouvement social.
La maire socialiste de Rennes, Nathalie Appéré, a condamné sans ambiguïté ces violences dans un communiqué. « Des débordements inadmissibles, notamment l'incendie volontaire d'un bus du Star qui heureusement ne transportait pas de voyageurs, et des heurts avec les forces de l'ordre, ont eu lieu aujourd'hui », a-t-elle déclaré.
Elle a tenu à exprimer son soutien « à celles et ceux qui ont subi ces actes inadmissibles, en particulier au chauffeur du bus et aux équipes de Keolis », tout en précisant qu'« une plainte va être déposée ».
Si elle rappelle que « la manifestation préalablement déclarée, qui a réuni des milliers de manifestants dans le centre de Rennes, s'est déroulée dans le calme », elle dénonce le fait que « des groupes violents ont cherché l'affrontement avec les forces de sécurité intérieure et tenté de commettre des dégradations une grande partie de la journée ».
Nathalie Appéré a enfin salué « les forces de sécurité et de secours ainsi que l'ensemble des agents publics pour leur mobilisation ».
Dans un registre plus offensif, Charles Compagnon, élu d'opposition Horizons au conseil municipal et pressenti comme candidat aux municipales de 2026, a dénoncé ce qu'il décrit comme un véritable « chaos ».
« Aujourd'hui, la rocade de Rennes est paralysée. Un bus du service public a été brûlé, les accès à Longchamp comme à Alma sont bloqués, la place Sainte-Anne - récemment rénovée - est une nouvelle fois le théâtre de casses et de violences, et des milliers de nos concitoyens, travailleurs, familles, étudiants, sont pris en otages », a-t-il déclaré dans un communiqué.
Présent le matin même au Forum économique breton à Saint-Malo, il a mis en garde contre les conséquences économiques de tels blocages : « Chaque blocage est une faute : il fragilise nos emplois et sert les ennemis de la France ».
L'élu centre-droit accuse également la majorité municipale de complaisance à l'égard des mouvements radicaux, estimant que « LFI et les mouvements d'ultra-gauche rennais tentent de détourner cette colère légitime vers le chaos » avec la « neutralité bienveillante - voire le soutien - de la majorité municipale actuelle ».
« Rennes, encore une fois, apparaît dans les médias non pas pour son rayonnement et son dynamisme, mais en tête des villes les plus impactées par la violence lors de ces manifestations. Rennes mérite mieux », a-t-il insisté, tout en saluant « les forces de police et les pompiers qui se mobilisent avec courage et professionnalisme pour contenir ces débordements et protéger les habitants ».
Sur les réseaux sociaux, la droite radicale a également fait entendre sa voix. Julien Masson, porte-parole du Rassemblement national à Rennes, a réagi sur X en mettant directement en cause les mouvements de gauche et le gouvernement. « C'était évident. La mobilisation du 10 septembre allait forcément être pourrie par l'extrême gauche », a-t-il écrit.
Selon lui, « la Macronie en fin de règne montre qu'elle aura été incapable de mettre ces miliciens violents hors d'état de nuire à Rennes comme ailleurs ». Une réaction brève mais virulente, qui s'inscrit dans la ligne habituelle du RN consistant à dénoncer l'inaction de l'État face aux violences urbaines.
À l'inverse, La France insoumise a tenu un tout autre discours en revendiquant le succès de la mobilisation. Sur X, la section rennaise du mouvement de Jean-Luc Mélenchon a salué « des milliers, des dizaines de milliers de manifestants à Rennes malgré une répression policière féroce », évoquant des « rocades et lycées bloqués, piquets de grève sur les lieux de travail » et assurant qu'il s'agissait de « la plus grande mobilisation depuis des années ».
« À Rennes comme partout en France, le peuple s'est soulevé », conclut leur message, qui ne fait aucune mention des violences survenues en fin de journée.
Ces réactions illustrent les fractures profondes du paysage politique local comme national face à la contestation sociale et à ses débordements : condamnation ferme mais mesurée pour la gauche institutionnelle, dénonciation sécuritaire au centre-droit, mise en accusation du gouvernement à l'extrême droite et célébration de la mobilisation à la gauche radicale. Rennes, une nouvelle fois, se retrouve sous les projecteurs nationaux pour des images de tensions et de violences, bien loin de l'image de ville dynamique et paisible qu'elle tente de promouvoir.